Aux termes de l’article L.111-1 alinéas 1 et 2 et L112-2 alinéa 9 du code de la propriété intellectuelle, le photographe bénéficie d’une protection au titre du droit d’auteur lorsque ses photographies sont originales, sans formalité et du seul fait de la création.

Lorsqu’un photographe fait valoir ses droits en justice (souvent pour un cas de contrefaçon ou d’utilisation de son oeuvre sans autorisation), il est classique que l’originalité de l’oeuvre soit contestée en défense, afin de faire « tomber » les droits d’auteur.

Dans un tel cas, l’originalité des photographie doit être explicitée par celui qui s’en prétend l’auteur, seul ce dernier étant à même d’identifier les éléments traduisant sa personnalité.

La jurisprudence européenne (CJUE, 1er décembre 2011, aff. C-145/10, [S] [P] contre Standard VerlagsGmbH e.a.) est venue préciser des critères d’analyse de l’originalité d’une photographie de portrait:

  • Au stade de la phase préparatoire, l’auteur pourra choisir la mise en scène, la pose de la personne à photographier ou l’éclairage.
  • Lors de la prise de la photographie de portrait, il pourra choisir le cadrage, l’angle de prise de vue ou encore l’atmosphère créée.
  • Enfin, lors du tirage du cliché, l’auteur pourra choisir parmi diverses techniques de développement qui existent celle qu’il souhaite adopter, ou encore procéder, le cas échéant, à l’emploi de logiciels.

À travers ces différents choix, l’auteur d’une photographie de portrait est ainsi en mesure d’imprimer sa « touche personnelle » à l’oeuvre créée et pourra donc prétendre à des droits d’auteur.

Récemment, le Tribunal judiciaire de PARIS (TJ de PARIS, 3e chambre, 4 juin 2025), saisi en contrefaçon de droits d’auteur sur l’usage dans un cadre non autorisé de 384 photographies (causes: impayé de la société de mode les ayant commandées, absence de signature d’un contrat de cession de droit d’auteur), a rappelé ces critères d’analyse.

En défense, la société de mode a contesté l’originalité des photographies, arguant d’un manque de créativité personnelle du photographe, les clichés résultant de directives précises qui lui ont été données.

En demande, la société de photographes a précisé ses choix artistiques:  “les produits des défenderesses sont mis en valeur par un jeu de volume, de contraste par rapport au fond blanc, de mise en lumière, de tenue parfaitement nette, de cadrage et de retouches ultérieures à leur livraison” ; a ajouté qu’ils “ont fait des choix techniques aboutissant à ces réalisations, en contribuant intégralement à la phase préparatoire de la prise des clichés, au sein du studio [W] et avec le matériel et les techniques leur appartenant” et que “surtout leurs réalisation, retouchées avant livraison et reprises si nécessaire avec l’avis [du client], ne s’apparente en aucun cas à des prises de vue à
l’improviste et sans participation active à la mise en scène des produits. En ce sens les photographies ne constituent pas une
simple opération technique”.

Pourtant… le tribunal les a déboutés de leurs demandes.

Estimant en effet qu’il revenait aux demandeurs de justifier de l’originalité de ses oeuvres, oeuvre par oeuvre, donc photographie par photographie, pour permettre au Tribunal de pouvoir traiter la demande en contrefaçon.

Attention donc à la rédaction des demandes en contrefaçon: il faut pouvoir justifier de choix artistiques sur chaque photographie !